Pour Élias Slemane, en hommage amical,

En l’an 38 naît l’église, à Antioche, capitale de la province de Syrie de l'empire romain, troisième ville de l’Empire, après Rome et Constantinople, devançant Alexandrie. Un demi-million de gens y résident.

Les longues rues, abritées du soleil et de la pluie, éclairées la nuit, débouchent sur des places ornées de statues et de fontaines. Les courses auxquelles on assiste à l’hippodrome ou les spectacles représentés dans l’amphithéâtre attirent les gens de toutes parts. La ville, appelée “Couronne de l’Orient”, fait la fierté de ses habitants. On y parle grec si l’on est de haut rang, syriaque si l’on est du peuple. 

Les Antiochéens ont le goût du plaisir. Les femmes sont élégantes, maquillées avec soin, les yeux discrètement ornés de khôl. Les gens aisés aiment à se rendre aux thermes en fin d’après-midi, pour s’y baigner mais aussi pour se faire masser, épiler, raser, manucurer. Ils aiment aussi se retrouver entre amis, assister à des comédies ou à des ballets licencieux au théâtre de Dionysos. Les prostituées et les gitons s’affichent sans vergogne. Les jeunes gens rivalisent avec les prostituées.

Les chrétiens de cette province était appelés Syriaques ou Syriens.

Les Syriaques orthodoxes

En 451, au concile de Chalcédoine, les églises arménienne, copte, éthiopienne et syriaque-occidentale furent accusées de soutenir la théorie monophysite selon laquelle la nature divine du Christ aurait absorbé sa nature humaine et que le Christ n’aurait en définitive qu'une seule nature : divine. Cette doctrine dénoncée aboutit à un nouveau schisme et les églises concernées, soucieuses de préserver leurs intérêts géopolitiques propres devinrent autocéphales.

Au sixième siècle l'évêque d'Édesse Yacoub (Jacques) al-Baradaï organisa l'église syriaque. Il entreprit un grand voyage dans toutes les régions syriaques pour ordonner des évêques, des prêtres et des diacres. C'est en son nom qu'on appellera l'église syriaque orthodoxe église « jacobite ».

En dépit des bouleversements géopolitiques incessants au Proche-Orient au cours du XXe siècle et depuis le début du XXIe siècle, les syriaques orthodoxes maintiennent encore des communautés vivantes mais fragilisées en Syrie, en Turquie et en Irak, soutenues par une diaspora très active en Europe, aux États-Unis et en Australie

Les Syriaques catholiques

L'église syriaque catholique est née d'un schisme au sein de l'église syriaque orthodoxe. Après plusieurs tentatives de rapprochement avec Rome dès le XVe siècle c'est en 1662 que fut reconnu le premier patriarche Syriaque-catholique, Ignace André Akhijan préalablement élu patriarche d’Antioche par le synode orthodoxe. Le patriarcat syriaque-catholique fut un temps aboli en 1702 mais définitivement rétabli en 1783 avec l'élection de l'évêque orthodoxe d'Alep Marc Ignace Michèle III Jean Jarweh sur le trône patriarcal syriaque-catholique.

Ainsi, deux siècles après la fondation de l'église chaldéenne, la refondation de l'église syriaque catholique consolidait la prégnance du catholicisme sur les deux grandes branches du christianisme mésopotamien. Cette mutation consacra l'aboutissement de plusieurs siècles d'activisme diplomatique politique et religieux du Saint-Siège et des monarchies catholiques européennes mais aussi l'audace des missionnaires catholiques en Mésopotamie.

Le siège patriarcal des syriaques catholiques fut établi à Mardin, Alep, Mossoul est enfin à Beyrouth où il est encore aujourd’hui. Si les syriaque-catholiques sont environ 150 000 dans le monde, c'est en Irak que se trouve leur capitale, à Qaraqosh, dans la plaine de Ninive, où ils sont près de 50 000.

Gérard Leroy, le 1 juin 2020