Pour Bernard, pour Pierre, pour Gilles, et pour Véronique et Marie-Jo, avec mon amicale sollicitude

   Ceux qu’on appelle les diakonos, dans la communauté juive helléniste d’Israël, autrement dit la communauté de ceux qui sont issus de la diaspora juive, ce sont des servants de table. C’est ce mot diakonos qu’on traduit par diacre, le service étant appelé diaconia. Le service des tables et la gestion des œuvres de bienfaisance de leur communauté sont les tâches assignées au diacre.

Dans les Actes des Apôtres, les diakonos sont à la fois serviteurs (ou servants), et dirigeants de la communauté helléniste. Les diacres assurent donc le service d’enseignement et de gouvernement. Chaque communauté choisit parmi les siens sept hommes pour assurer le service important des tables. Ceci est raconté dans Ac 6, 1-6. “Choisissez-vous 7 hommes”, “Épiscopez vous !” dit le texte.

Le service des tables est important car le repas est important. C’est l’occasion d’écouter la Parole de Dieu et de la prolonger par un échange et une catéchèse. Pour qu'il y ait repas il fallait un invité. Sinon on grappillait. Aux repas de fête on mangeait l’agneau. Le repas d’une communauté, longuement préparé à l’avance, était payé par la bourse communautaire. On peut lire, en 1 Co 11, 17, la manière de célébrer le repas du Seigneur.

Dès les débuts de l’Église, le diacre assure le service de la célébration eucharistique, il lit l’Évangile, distribue la communion, prend en charge la catéchèse, organise le ministère de la charité ecclésiale, assure l’administration et la prédication.

Jésus parle du diakonos, qui sert les plats, en Lc 22, 24-27. Celui-ci n’est-il pas plus grand que celui qui est servi ? (Jn 13, 15). Jésus lui-même se présente comme diakonos, et il fait exercer le service diaconal aux Douze. Dans les groupes juifs de l’époque on trouve des officiers chargés de réglementer ce service. À Qumrân notamment. La fonction n’est pas réservée aux hommes. En effet dans sa lettre aux Romains (Rom 16, 1), Paul cite une certaine Phoebé qui est diaconesse (cf. aussi 1 Tm 3, 8-13).

Dès le IIe siècle, à Antioche, dont Ignace est l’évêque, les diacres sont reconnus et incorporés dans la hiérarchie de l’Église. Ils sont serviteurs de l’évêque, et s’attachent plus particulièrement à servir la charité et le culte, la gestion des biens de l’Église et leur répartition.

Au moyen-âge, le diaconat perd de son importance en devenant une simple étape préparatoire au sacerdoce.

Quelles sont les fonctions du diacre aujourd’hui ? Vatican II a redéfini le diacre selon trois axes principaux, comme serviteur de la Parole, de la prière, et des pauvres. Selon ces trois axes le diacre se voit proposer plusieurs fonctions vers lesquelles le portent ses aspirations et ses propres charismes, celle de proclamer l’Évangile, de distribuer la communion, d’assister les mourants, d’administrer le baptême, de présider aux funérailles et aux sépultures, de former. Il soutient ou prend part aux activités apostoliques des laïcs, assiste aux Conseils pastoraux de la paroisse et du diocèse, ce qui le renseigne sur les besoins contingents de l’Église locale.

Le diacre peut aussi, en l’absence du prêtre, assumer un ministère de suppléance que lui assigne le prêtre absent.

Il ne peut présider l’Eucharistie, ni pardonner les péchés. On peut se demander pourquoi il ne lui est pas proposé d’assurer l’onction des malades puisqu’une de ses fonctions majeures est de se disposer à leur service.

Son statut lui est conféré par l’imposition des mains de l’évêque.

On a affaire à trois sortes de diacres :

- les permanents, qui ne sont pas mariés et ne sont admis au diaconat que s’ils ont atteint l’âge minimum de 25 ans.

- les permanents mariés doivent, eux, être âgés de 35 ans minimum. Lors, le consentement de l’épouse est requis pour être admis au diaconat.

- les non permanents sont ceux qui se disposent à la cléricature. Ils sont en marche vers le presbytérat. Ceux-là sont célibataires.

Le diaconat est un sacrement. La théologie a reconnu à l’Église le pouvoir de prendre des dispositions pour conférer, quand la situation l’exige, cet unique sacrement de l’ordre. Ce qui a permis à Vatican II de restaurer le diaconat en tant qu’ordre indépendant et permanent dans l’Église.

Certains se demandent si on doit maintenir en l’état un fonctionnement qui a fait son temps ?

La structure ecclésiale, sous le souffle de l’Esprit, est appelée à muter. Et certains se demandent s’il n’y a pas eu, avec le rétablissement du diaconat permanent, une déviance opportuniste de ce ministère spécifique, au détriment d’un laïcat compétent et engagé, dans la formation par exemple. La tendance irait à contre-sens des besoins en quête de la vraie Bonne Nouvelle. Mais l’Église n’a-t-elle pas besoin d’assistants au culte et de formateurs; et la formation doit-elle être exclusive et réservée aux diacres ? Où est l’essentiel ? Réservé au fonctionnement d’une institution, aussi sainte soit-elle ? Ou bien d’annoncer aux hommes que le Fils ressuscité les aime ?

Aujourd’hui encore, cinquante ans après Vatican II, on peut s’étonner de toujours tâtonner pour insérer le diacre dans l’ensemble ministériel.

En tout état de cause, le diacre devra correspondre aux besoins pastoraux. Au candidat diacre de stimuler son imagination prospective pour déceler, dans le présent, tous les possibles ignorés, et participer, selon ses charismes, à l'aménagement d’un avenir neuf.
 

 

Gérard LEROY, le 12 avril 2012