Pour Sophie Guerlin, en hommage amical

   « Alors Dieu dit : « créons à notre image des hommes semblables à nous (…) Dieu créa l’homme à son image (…) Il le créa homme et femme » (Gn 1, 26-28).

Retenons qu’en cela la nature de « l’homme et femme » est à supposer différente de la nature des autres créatures vivantes qui ne sont pas désignées « à l’image de Dieu ».  L’homme est créé selon un mode particulier.

Le second chapitre de la Genèse attribue à l’homme de se rendre maître de la nature, certes, mais aussi de lui-même. Nous sommes ici renvoyés à la dignité de l’homme qui se comprend en ce que l’homme accède au plus près de ce que Dieu attend de lui, c’est-à-dire au plus près de son image.

Il est dit ensuite que l’homme quittera père et mère pour être attaché à sa femme et qu’ainsi « ils seront deux en une seule chair » (Gn 2, 21-24).

L’Écriture nous enseigne encore que la puissance est donnée à l’homme aussi bien sur la nature que sur lui-même, sur son histoire, sur sa vie. C’est dans ce don de puissance fait par Dieu à l’homme que réside la ressemblance « naturelle » de l’homme avec Dieu. Ce caractère ontologique de la puissance, l’homme peut l’exercer ou bien ne pas en user. Il appartient à sa nature, libre, d’exercer cette capacité dynamique à mener les choses.

Aujourd’hui, une tendance fatale est en œuvre, qui voudrait exercer toujours plus la puissance dont l’homme est doté, dans les sciences et la technique, au nom du progrès et du bien-être. Alors l’homme en vient à exercer sa souveraineté dont il a soustrait la morale sous-jacente. La culture de la personne, coupée de ses racines, se révèle impuissante en face de la poussée positiviste et le refus de la Révélation.

Or, la puissance n’acquiert sa densité, sa grandeur que dans la mesure où elle ne s’est pas délestée de la responsabilité. Si la puissance humaine a sa racine dans la ressemblance de l’homme avec Dieu, l’homme accède à la souveraineté par grâce, chargé d’une responsabilité envers Celui qui est souverain par nature. Ainsi la souveraineté devient obéissante et service.

Le mot « Souveraineté » ne signifie donc pas que l’homme est en capacité d’imposer sa volonté à la nature. La connaissance accueille ce que l’existant est en soi dans l’obéissance et le service. Par sa souveraineté l’homme doit donc, non pas ériger son propre monde dans l’autonomie, mais parachever le mode divin selon la volonté de Dieu, en tant que monde de la liberté humaine.

 

Gérard Leroy, le 30 octobre 2020